top of page

Vieux Kapiten, Danü Danquigny

  • Photo du rédacteur: M. O.
    M. O.
  • 16 juil. 2024
  • 2 min de lecture

Noir, très noir, le dernier roman policier de Danü Danquigny, ou, plutôt rouge et noir, comme le drapeau albanais, tant le sang coule au rythme des règlements de compte. En Albanie, Ernest Dervishi, le « vieux kapiten » recherche un magnat de la drogue surnommé « le Diable » et veut récupérer sa fille. En France, à Morclose (Rennes), Desmund Sasse, alias Peter Punk, ancien détenu devenu justicier, enquête sur la mort suspecte d’un jeune homme. Accusé de meurtre, il est contraint de fuir et sa quête l’entraîne jusqu’en Albanie. Son amie Elise Archambault, détective privée, est engagée par un avocat pour retrouver son fils, enfant perdu mêlé à de sombres trafics. Les trois intrigues se superposent de chapitre en chapitre - au risque, parfois, de perdre le lecteur entre les différents personnages. Les histoires progressent dans un rythme effréné et se rejoignent puisqu’elles sont liées au trafic international de drogue. Les sacs de billets et d’héroïne circulent entre la France et l’Albanie, laboratoire pour l’Europe de l’Ouest.


Les personnages charrient leurs fantômes, leurs remords secrets qui resurgissent. A travers eux, ce sont aussi des lieux qui existent et surtout l’Albanie « le pays des aigles ». Son passé ottoman, les années de la dictature communiste d’Enver Hoxha et celles qui ont suivi et entrainé le pays dans la corruption sont évoqués avec Dervishi, ancien membre de la terrible Sigurimi : « Bien sûr, il s’était fourvoyé. Le pays tout entier s’était fourvoyé, se débattant dans la folie de son dirigeant. » Desmund Sasse, narrateur à la première personne qui s’impose peu à peu comme le protagoniste, exprime son rapport ambigu à Morclose, ville qu’il déteste et dépeint au vitriol mais qu’il reconnait finalement comme sienne dans une déclaration empreinte de lyrisme : « J’ai besoin de ses rues mal fichues et de ses troupeaux de grues, de ses troquets enfumés, de sa misère sans nom et de sa beauté surannée, de ses étudiants bourrés et de ses notables endormis, de sa culture de la révolte et du bordel, de ses bacchanales historiques et de ses dimanches assoupis, du vent d’ouest qui apporte avec lui la pluie Océane et la brume de mer… » On sent la présence de l’auteur - qui a fait ses études à Rennes et connait intimement l’Albanie.


Outre le plaisir du suspens et la plongée dans un pays méconnu, c’est sans doute là l’un des aspects les plus réussis du livre.


Vieux Kapiten, Danü Danquigny, série noire, Gallimard, 2024, 245 pages.

Comments


bottom of page